Mordecai Richler sur un air de comédie musicale (Le Devoir)

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June 8, 2015

Le Devoir
By Caroline Montpetit
June 6, 2015


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Duddy Kravitz persiste et signe. Et c’est sous les traits du jeune comédien Ken James Stewart, de 29 ans, qu’il reprendra vie du 7 au 28 juin au Centre Segal de Montréal. Le Centre Segal accueille en effet une comédie musicale, basée sur le célèbre roman de Mordecai Richler, The Apprenticeship of Duddy Kravitz, qui prend place dans le Montréal juif des années 1950, du Mile End à Westmount et Outremont.

Le livret et les paroles de la chanson de la comédie musicale sont signés David Spencer, la musique est d’Alan Menken, lauréat de plusieurs Oscar décernés à la meilleure musique de film, et la mise en scène est d’Austin Pendleton.

Les trois hommes fréquentent cette oeuvre de Mordecai Richler, une réflexion sur l’ambition humaine, depuis longtemps. Tous trois ont travaillé à une version précédente de la comédie musicale, qui avait été présentée à Philadelphie, en 1987. L’ensemble du livret, d’abord écrit par Austin Pendelton, a cette fois été repris par David Spencer. Ce dernier a également réécrit les trois quarts des chansons pour lesquelles Alan Menken a composé de nouvelles musiques.

Le tout promet d’être « très réaliste », promet David Spencer.

En fait, c’est la fin du roman de Mordecai Richler qui avait posé problème dans le passé. Tentant d’être le plus fidèle possible au roman, Austin Pendleton avait d’abord signé une fin très triste, dans laquelle Duddy Kravitz perd tout espoir de rédemption. « Le public ne voulait pas de cette fin », raconte-t-il aujourd’hui. Le producteur, qui souhaitait que le spectacle se rende à Broadway, a donc exigé que le spectacle finisse quelques minutes plus tôt, sur Welcome Home, une chanson d’Yvette, l’amoureuse de Duddy Kravitz. « C’était beaucoup trop joyeux, ça n’était pas mieux », dit Austin Pendleton, qui a été congédié par le producteur sur les entrefaites. La comédie musicale The Apprenticeship of Duddy Kravitz n’a donc jamais été présentée à Broadway. Austin Pendleton promet cette fois que le spectacle se clôturera sur une note « ni trop triste ni trop joyeuse ». Décédé en 2001, Mordecai Richler n’aura jamais l’occasion de donner son opinion sur cette nouvelle version de son oeuvre. Quatorze comédiens, de Montréal et d’ailleurs, se partagent la distribution.

Ça n’est pas seulement à cause de sa fin que le roman de Richler est difficile à adapter pour la scène, poursuit David Spencer. La trame du livre est très dense et les personnages nombreux. Au moins deux intrigues, celle entourant le lac des Laurentides que Kravitz rêve d’acheter, et ses relations avec sa famille, se côtoient. Les décors se déplacent d’ailleurs successivement du quartier Mile End de Montréal à Sainte-Agathe-des-Monts.

De l’avis de tous, Montréal figure comme un personnage à part entière, dans le livre comme dans la comédie musicale. « C’est la précision des références au temps et aux lieux qui font qu’une pièce est universelle », dit Pendleton.

Mordecai Richler lui-même avait déjà écrit le scénario d’une première comédie musicale basée sur son roman, présentée à Edmonton dans les années 1980. Austin Pendleton se souvient aussi qu’il assistait à des répétitions de la deuxième mouture, dans la ville de New York.

« Je l’aimais beaucoup », se souvient-il.

Pour David Spencer, The Apprenticeship of Duddy Kravitz réfère à sa propre expérience en tant que jeune juif grandissant dans un milieu urbain. « Je ne suis pas de Montréal, dit le New-Yorkais, mais beaucoup de ce que Duddy vit ressemble à ce que j’ai vécu. C’est pour moi un carré de sable confortable où jouer. » Austin Pendleton a quant à lui d’abord découvert cette oeuvre de Mordecai Richler à travers le film de Ted Kotcheff en 1974. Tant le livre, publié initialement en 1959, que le film qu’en a tiré Ted Kotcheff ont connu un important succès sur la scène internationale.

The Apprenticeship of Duddy Kravitz raconte l’histoire d’un jeune Juif ambitieux, obsédé par le pouvoir et par l’argent, qui rêve de faire fortune en acquérant un lac privé des Laurentides pour en faire un lieu de villégiature. Duddy Kravitz entretient également des relations complexes avec son oncle Benjy, et avec divers associés qu’il rencontre sur sa route.

Selon David Spencer, toute la thématique d’une comédie musicale peut souvent se résumer dans une simple strophe. Celle de The Apprenticeship of Duddy Kravitz pourrait se résumer en ces termes : « l’homme que tu deviendras ».

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