Tales from Odessa: Socalled fait chanter la mafia russe

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June 17, 2013

La Presse
June 16, 2013
By Jean-Christophe Laurence


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Le DJ montréalais a écrit la partition d'un nouveau spectacle en yiddish, inspiré des Récits d'Odessa, de l'écrivain juif Isaak Babel.

Les comédies musicales se suivent et ne se ressemblent pas pour SoCalled. Après avoir mis des marionnettes en scène pour The Season, présenté il y a trois semaines au Rialto, le musicien montréalais s'associe au Théâtre Yiddish de Dora Wasserman, pour une production beaucoup plus sérieuse.

Présentée au Centre Segal du 16 juin au 7 juillet, Tales from Odessa est une comédie musicale en yiddish inspirée d'un livre de nouvelles russo-juif d'Isaak Babel (Récits d'Odessa). Ici, pas de marionnettes (ou si peu), mais une histoire de mafia juive sanglante qui se passe autour de la révolution russe.

On imagine bien Socalled participer à l'aventure. Même si le compositeur donne généralement dans des créations à caractère plus pop, son approche postmoderne du klezmer en faisait le meilleur candidat pour cette adaptation musicale en yiddish.

Plus encore, il est un fan autoproclamé de comédies musicales et affirme être un grand amateur des films de gangsters.

«Le genre a toujours été un de mes préférés, dit-il. C'est une riche métaphore pour raconter des histoires de famille, de race, d'avarice, de corruption, de valeurs, de moralité. L'oeuvre de Babel me semblait le matériau parfait non seulement pour toucher au genre gangster, mais aussi pour explorer l'identité juive ashkénaze pré-Holocauste sous un jour un peu tordu.»

Le pouvoir

Publiés pour la première fois en 1923, les Récits d'Odessa relatent les aventures et la montée vers le pouvoir de Benya Kirk, dit le King, un pégreux régnant sur le quartier juif de Moldavanka, dans la ville russe d'Odessa.

Histoire brutale, forcément. Mais à travers la violence, c'est aussi toute l'éthique et les valeurs familiales juives qui sont ici explorées par Isaak Babel à travers son personnage principal.

«C'est une histoire de sang et de liens de sang, résume Derek Goldman, auteur du livret. Benya Kirk est brutal, mais il est aussi un antihéros qui a un code d'honneur et une vision de ce que c'est d'être juif. Le résultat est à la fois sombre et très drôle.»

Goldman admet qu'il n'avait pas vraiment lu Babel avant de plonger dans ce projet. Mais à force d'éplucher les Récits d'Odessa, il dit être «tombé en amour» avec la «voix unique» de cet écrivain juif qui a toujours écrit en russe. S'il n'a pas la réputation d'un géant comme Tolstoï, Babel reste perçu comme un grand par plusieurs experts en littérature juive et russe.

Pour ce qui est de la version sur scène, on attend de voir.

Les Récits d'Odessa ont déjà été adaptés pour le théâtre (Sunset) par Babel lui-même en 1927, une pièce qui avait suscité l'admiration de l'écrivain Boris Pasternak et du cinéaste Sergeï Eisenstein. Mais sauf erreur, il s'agit bel et bien d'une première adaptation en comédie musicale yiddish, ce qui amène Goldman à décrire ce nouveau spectacle, dirigé par Audrey Finkelstein, comme un «regard frais sur une oeuvre nostalgique».

Une trentaine de comédiens et un authentique orchestre klezmer seront sur scène, mais ne vous attendez pas à y voir Socalled, qui se contente ici d'un rôle de compositeur dans les coulisses.

Pour ce qui est du yiddish, pas d'inquiétudes, promet Goldman. «La force du spectacle n'est pas tant dans les subtilités de la langue que dans l'action et dans la musicalité. Ces éléments en disent déjà beaucoup. Ce sera suffisant pour comprendre.»

Tales from Odessa, au Centre Segal, du 16 juin au 7 juillet.

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